Les CPTS en bref
Définition
« Les CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé) regroupent les professionnels d’un même territoire qui souhaitent s’organiser – à leur initiative – autour d’un projet de santé pour répondre à des problématiques communes : organisation des soins non programmés, coordination ville-hôpital, attractivité médicale du territoire, coopération entre médecins et infirmiers pour le maintien à domicile…»
C de Communauté et S de Santé
La CPTS c’est la Communauté de tous les acteurs de santé, du social et du médico-social, autour d’une approche globale de la santé, pour et avec les habitants du territoire.
Article L1434-2 du Code de la Santé Publique
Combien de CPTS en France ?
Environ 200 projets de CPTS ont été recensés par la mission de l’IGAS en 2018.
Quelques exemples concrets :
- Le CPTS du 13e arrondissement de Paris
- La CPTeSt (Communauté Professionnelle Territoriale de Santé de l’est)
- La CPTS 28
- La CPTS du pays de Craon
L’accompagnement de AVECsanté
Fortes de dix ans d’expérience dans la facilitation et l’accompagnement des MSP dans un objectif d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins primaires, AVECsanté et ses fédérations régionales informent, accompagnent et outillent les professionnels sur les CPTS.
La position de AVECsanté
L’organisation territoriale de l’offre de santé: un vrai défi, une vraie chance ?
Accompagner l’évolution de l’offre et des besoins
Le système de distribution des soins primaires est en transition vers l’élaboration d’un système de santé. Cette adaptation répond à la réalité des besoins de santé d’aujourd’hui. La nécessité est si forte qu’elle contraint le pouvoir politique à intervenir pour signifier aux professions libérales, à l’hôpital, et aux acteurs médico sociaux qu’ils doivent se « refonder » pour s’adapter aux besoins des usagers. Cette indispensable dynamique en cours doit cependant faire face à un monde hospitalier en crise et à une majorité de soignants libéraux désemparés face à la nécessité d’une redéfinition de leurs missions, d’un décloisonnement de leurs différentes professions, et d’une évolution de leurs modalités d’exercice, tous changements devant être accompagnés.
Dans le contexte actuel de tension de la démographie médicale, la question de l’organisation territoriale de l’offre de santé est primordiale. La transversalité et la pluriprofessionnalité ne se décrètent pas mais se construisent d’abord au niveau local. La notion de « virage ambulatoire » qui a prévalu dans la Loi de Modernisation du système de Santé de janvier 2016 instituant les CPTS doit partir du local et être accompagnée. L’organisation territoriale devra être adaptée, partagée, ancrée dans les autres dynamiques territoriales et co-construite par l’ensemble des acteurs. Pour cela, il faut pouvoir dépasser les conservatismes, aller au-delà des corporatismes, faire vivre les coopérations à l’intérieur des équipes et entre elles – équipes de proximité et d’établissements, sanitaires, sociales et médico-sociales –, oser l’innovation et disposer de moyens dédiés.
Construire une nouvelle culture du soin et de la santé, du cabinet de consultation à l’action de santé sur le territoire.
Cette transformation des pratiques professionnelles, des missions qui définissent nos métiers, ces nouvelles collaborations transversales entre les différents acteurs, nous les réalisons au quotidien en donnant vie à des projets de santé de MSP inscrits dans un territoire. La dynamique de l’exercice coordonné par des professionnels organisés en MSP progresse et avec elle la méthodologie d’accompagnement et de soutien de AVECsanté et de ses fédérations régionales. Les MSP offrent un ancrage territorial de proximité solide, organisé, identifié et accessible pour les usagers. Elles constituent sur un territoire un chainon indispensable au maillage de l’ensemble des acteurs de la santé, rendant ainsi possible le déploiement de politiques de prévention et de promotion de la santé.
L’expérience acquise dans la construction des Pôles de Santé et des MSP par les membres de AVECsanté et de ses fédérations régionales leur donne légitimité à définir les CPTS en les construisant. D’autant plus qu’actuellement l’essentiel des CPTS existantes se mettent en place à partir de MSP. Ce constat est logique puisque la dynamique des actions portées par les MSP amène à résoudre au quotidien les problématiques liées au travail pluri-professionnel. La création de nouveaux outils et le développement de compétences produisent d’autres fonctionnalités profitables aux futures CPTS. Et ainsi de suite.
Le temps du terrain n’est pas le temps du politique.
La tentation est grande pour les politiques publiques d’utiliser les CPTS comme des prestataires à même de solutionner les problèmes qu’elles pensent prioritaires. La question des soins, en particulier ceux des médecins, étant largement mis en avant sur les autres déterminants de la santé. Lors de la présentation du plan « Ma Santé 2022 » le président de la République annonce la création de mille CPTS ! La ministre des Solidarités et de la Santé souhaite imposer aux CPTS un cadre de travail sur un socle de 5 actions. Si nous reconnaissons le bienfondé de ces priorités, nous ne validons pas pour autant la méthode, ni même la finalité de la CPTS.
Pour AVECsanté il est nécessaire de définir d’abord l’objet de la CPTS avant ses priorités et la faisabilité de sa mise en œuvre. La loi explique bien le déroulé de la construction de la CPTS : faire un diagnostic partagé des besoins de santé de la population et des professionnels du territoire. Ceci n’est pas une formule de circonstance. Le diagnostic partagé est bien la mise à l’épreuve du travail collectif. Il s’appuie sur une méthode, il s’auto-évalue, il a ses passages obligés. Chaque territoire ayant sa spécificité, élaborer un diagnostic partagé conduit à construire une culture commune indispensable au fonctionnement d’une CPTS. A partir de ce diagnostic partagé, un projet de santé est élaboré et présenté à l’ARS pour validation ; c’est-à-dire pour vérifier son adéquation avec le Plan Régional de Santé.
Le temps du diagnostic partagé est celui de l’intelligence collective et de l’intérêt commun. Il évitera la création d’entités alibi, qui ne se seraient pas réellement ancrées dans leur territoire.
Que veut dire le « C » et le « P » de CPTS ? Qui fait communauté et qui sont les professionnels ?
Faire Communauté a beaucoup de sens. Cela signifie construire ensemble un Commun qui, pour la santé, ne peut avoir comme seules finalités l’amélioration de la santé de la population, et la simplification du travail des professionnels au quotidien. En se constituant en équipe, les professionnels du soin qui s’engagent dans une CPTS acceptent d’associer à leurs actions de soin celles de prévention, d’éducation, de coordination, de promotion de la santé. Et nous avons appris au sein des MSP qu’il n’est pas facile de passer du soin à la santé, de la patientèle à la population.
C’est le rôle essentiel des équipes régionales de ressources portées par les fédérations régionales de AVECsanté que d’accompagner les équipes et les professionnels vers une réflexion territoriale plus large. La facilitation a ici une place stratégique pour assurer l’atteinte de ces objectifs ambitieux.
Les professionnels du soin ne sont pas les seuls acteurs du territoire à améliorer la santé de la population, le soin auprès des personnes malades ne résumant pas l’ensemble des actions de santé. D’autres déterminants sont à l’œuvre, comme dans le cas des maladies chroniques. Il est donc logique et normal d’associer à la CPTS les autres professionnels des établissements de soins mais aussi du médico-social, de la prévention, et de l’éducation ; ainsi que les élus du territoire : acteurs de santé, au travers de leurs responsabilités et des décisions qu’ils prennent ils doivent être invités à la dynamique des CPTS, surtout dans le cadre des Contrats Locaux de Santé. Enfin les habitants qui sont de fait les premiers concernés, par leurs savoirs et leurs expériences sont tout désignés pour être des acteurs du projet de santé territorial.
La Communauté est grande. Le défi pour la CPTS est de trouver les organisations juridiques, économiques, démocratiques, qui permettent à cette Communauté de faire action commune.
Que veut dire le T de CPTS ?
L’organisation territoriale de l’offre de santé se construit sur un bassin de vie. Ce bassin de vie a son histoire, ses caractéristiques géographiques, ses données ethnologiques, … L’existence de l’offre de soin n’est pas exclue de cette histoire. Nous avons appris dans les MSP à aller à la rencontre du territoire car, par définition, le projet de santé de la MSP a vocation à s’ouvrir à la population. Nous construisons au quotidien des liens avec les autres acteurs du territoire et nous nous en imprégnions, nous nous immergeons dans la vie du territoire qui, pour nous, se définit par une évidence sociogéographique et non par une limite administrative.
Cela n’a pas de sens de définir la CPTS par une quantité de population. Plus qu’un nombre (tel que cela a été évoqué : 10 000, 20 000, 100000…) ce sont le bassin de vie et les usages de la population qu’il faut observer et respecter.
Là où ils existent, il est nécessaire de s’appuyer sur les Ateliers Santé Ville (ASV) et les Contrats Locaux de Santé (CLS). Mais nous savons déjà qu’il est difficile de faire communauté surtout quand la décision est essentiellement politique, que la logique qui la conduit devient trop prescriptive et risque d’étouffer l’initiative issue de celle du terrain. C’est le projet de santé territorial qui définit son territoire. Il y aura des projets transversaux, rien n’est figé, tout est mouvant au gré de la réponse aux besoins de santé.
Que veut dire S de CPTS ?
Ce S est crucial : selon la définition qu’on lui donne on construit une CPTS différente. L’alternative est entre le S de Soin et le S de Santé.
Si le S de CPTS est celui de soin alors la finalité de la CPTS se réduit, ce qui n’est pas négligeable, à une amélioration du parcours de soins en ville, du lien ville-Hôpital, au développement de la médecine de protocoles. L’objet de la CPTS ne peut être réduit à l’organisation des soins non programmés, même si ce sujet pose un problème réel d’accès aux soins. Doit-on constituer une CPTS uniquement pour le régler ?
Si le S de CPTS est le soin, alors les professionnels du soin, notamment libéraux, en revendiqueront la gouvernance. Deux écueils à cela :
- Une gouvernance mono catégorielle serait forcément exclusive et il y a « loin de la coupe aux lèvres » dans l’implication des professionnels libéraux. Le risque est alors que celle-ci soit faible, même avec une gratification financière.
- La gouvernance de la CPTS risque de reproduire les batailles corporatistes ce qui aggrave la dynamique d’exclusion des autres acteurs du territoire.
Si le S de CPTS est celui de la Santé, l’enjeu est plus ambitieux mais aussi plus « impératif ». C’est autour de la problématique santé identifiée que se construit la démarche communautaire. Il devient alors possible de faire de la prévention (et pas seulement du dépistage), de l’éducation (et pas seulement des programmes d’ETP), il devient possible de faire de la promotion de la santé au-delà du discours médical, avec le savoir-faire de la population, comme l’a montré la santé communautaire. C’est dans cette dynamique que s’inscrivent les MSP. L’ambition est plus grande, plus difficile, mais au moment où les maladies chroniques « explosent » nous savons que, pour agir sur la cause de ces maladies, le soin a ses limites et la santé toutes les capacités à le faire.
Nous croyons en l’organisation territoriale de l’offre de santé puisque nous y participons déjà. Nous savons que, loin d’être une contrainte, la CPTS est un outil qui peut montrer aux professionnels actuellement isolés qu’il y a plus de satisfactions à travailler dans l’exercice coordonné, comme cela se fait au sein des MSP, que dans l’exercice solitaire.
Notre défi est de construire des CPTS portant une ambition collective et plurielle, impliquant tous les acteurs de la santé des territoires, partageant un objectif commun : améliorer la santé pour tous, avec tous et partout !
Les professionnels de soins primaires en équipes coordonnées doivent y prendre toute leur place mais aussi donner l’impulsion, par leur expérience, à la création et au développement de ces communautés.